Le potentiel de protection climatique du biochar réside dans sa capacité à stocker le carbone sur le long terme. Il fait partie des diverses solutions biologiques de stockage du CO₂, également connues sous le nom de puits de carbone, Carbon Dioxide Removal (CDR), ou technologies d’émissions négatives (voir la FAQ sur les émissions négatives). Alors que la décomposition ou la combustion naturelle de la biomasse libère du CO₂, le carbone présent dans le biochar reste piégé pendant des centaines voire des milliers d’années – à condition qu’il soit stocké et conservé dans le sol. Ainsi, 1 tonne de biochar peut extraire de l’atmosphère environ 2,5 à 3 tonnes d’équivalents CO₂.
Le biochar est produit par pyrolyse: la biomasse, telle que les résidus de bois, les déchets verts ou la paille, est chauffée sous vide d’air à des températures comprises entre 350 et 900 °C. Environ la moitié du carbone contenu dans la biomasse est transformée en une forme stable. Le produit final est un charbon végétal poreux, riche en carbone, qui peut rester dans le sol pendant des siècles.
Outre ses avantages pour le climat, le biochar présente également des avantages agroécologiques. Mélangé au compost ou au lisier, le biochar réduit les pertes de nutriments et les émissions de gaz à effet de serre, comme le protoxyde d’azote. Il améliore également la structure du sol et augmente sa capacité de rétention d’eau. La microbiologie du sol est également favorisée, ce qui peut à son tour stimuler la croissance des plantes. La «terra preta», terre noire des cultures indigènes en Amazonie, témoigne de la fertilité à long terme de ces sols enrichis en biochar.
Malgré ses avantages, le biochar n’est pas un remède miracle. Son utilité dépend de la qualité de la biomasse utilisée, du processus de fabrication et du type d’utilisation. Par exemple, si du biochar est produit à partir de bois qui aurait autrement pu être utilisé comme matériau (p. ex. comme bois de construction), le bilan climatique est moins positif. L’utilisation énergétique des gaz et des huiles produits lors de la pyrolyse est également déterminante pour l’efficacité globale.
Par ailleurs, le biochar n’est pour l’instant disponible qu’en quantités limitées, et sa production reste souvent coûteuse. Pour maximiser le potentiel du biochar, il est essentiel de mettre en place des conditions politiques stables, des mesures incitatives et des normes de qualité claires. La Suisse pourrait produire conformément à la vision de Charnet, l’Association suisse du biochar jusqu’à 4 millions de tonnes de CO₂ par an avec du biochar issu de biomasse durable. Le biochar pourrait ainsi absorber environ un tiers des émissions fossiles restantes en cas de zéro émission nette d’ici 2050, tout en contribuant à éviter entre 1 et 2 millions de tonnes de CO₂e supplémentaires grâce à son utilisation en agriculture.
Il existe désormais des normes d’assurance qualité en Europe, comme le «European Biochar Certificate» (EBC) de Carbon Standards International (CSI), qui a été co-développé par l’Institut d’Ithaka, un réseau international dédié aux stratégies carbone et à l’agriculture climatique. Les directives de CSI pour le puits C, Global Biochar C-Sink, garantissent l’origine de biomasse durable, une production peu polluante et une utilisation sûre. La capacité de séquestration certifiée du biochar constitue une contribution majeure à la protection du climat. Elle nous permet, en tant que société, de faire un pas décisif vers l’objectif de zéro émission nette de gaz à effet de serre.
Le biochar est un outil fascinant pour la capture du carbone et l’amélioration des systèmes agricoles. Lorsqu’il est utilisé à bon escient, le biochar représente une solution efficace, évolutive et naturelle pour lutter contre le changement climatique. Mais comme pour toutes les solutions, il ne remplace pas une réduction drastique des émissions – que ce soit dans l’entreprise ou en tant que particulier – mais constitue un complément judicieux. Pour qu’il déploie pleinement tout son potentiel, il faut une étroite collaboration entre les secteurs de la sylviculture, de l’agriculture et de l’énergie, une sensibilisation à la valeur du CO₂ et le soutien à divers projets de protection climatique grâce au biochar.
Sources:
IPCC 2018. Global Warming of 1.5°C. An IPCC Special Report
Vous trouverez de plus amples informations sur le changement climatique et la protection du climat dans notre Brochure climatique